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Dans une école de la deuxième chance, des apprentis cinéastes pour sensibiliser au genre

Laura, non-binaire, harcelée. Corentin, homosexuel, abusé. Justine, bisexuelle, lourdement draguée. Tous trois élèves d'une école de la deuxième chance à Armentières. Ils se racontent face caméra, dans leur propre film, grâce à une association, "Civic Fab", qui aide des jeunes à développer leur esprit critique.

E-llico.com / Actus

Dans une école de la deuxième chance, des apprentis cinéastes pour sensibiliser au genre
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Mis en ligne le 12/05/2022

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Thème du jour: le genre, choisi par les responsables de l'école. Sous l'égide de réalisateurs, douze grands adolescents ou jeunes mineurs, aux parcours scolaires souvent chaotiques, doivent écrire un scénario par petits groupes, puis tourner de courts films de sensibilisation. Ils font partie de la trentaine de jeunes de 16 à 25 ans, majoritairement sans diplôme, accueillis par cette école de la deuxième chance (E2C) pour une remise à niveau et la définition d'un projet professionnel.

"De plus en plus de jeunes sont concernés par ce sujet (du genre) et on est aussi un peu démunis sur la façon d'accompagner ceux qui sont en changement d'identité", explique Jérôme Bolpaire, chargé du projet pour l'E2C.

Dans le groupe, Laura, Corentin et Justine sont les plus directement touchés par les discriminations et violences liées au genre. Rejoints par Stéphanie - hétérosexuelle insultée pour avoir tenu la main de sa colocataire - et guidés par la photographe et vidéaste Maureen Ragoucy, ils choisissent de tourner un documentaire, à la première personne, visages graves devant un mur noir. "Peu importe notre différence, notre genre, respectez-nous", concluent-ils d'une même voix.

"Tendance à se dévaloriser" 

Financée entre autres par l'Agence nationale de cohésion des territoires et le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, "Civic Fab" cherche à encourager l'esprit critique de jeunes "de milieu défavorisés ou ayant connu des accidents de la vie" en s'appuyant sur les nouvelles technologies, résume Myriam Chetouane, animatrice de cet atelier avec deux autres réalisateurs. Ces échanges sont organisés partout en France.

Certains portent sur le harcèlement, d'autres sur le vivre-ensemble. Tournés avec des tablettes par les élèves eux-mêmes, les petits films ont aussi pour but de leur montrer qu'ils peuvent, avec peu de moyens, réaliser un projet complet, monté sur un logiciel gratuit. "Ce sont des jeunes qui restent souvent sur la réserve, qui ont subi des échecs. Ils ont toujours tendance à se dévaloriser", constate Jérôme Bolpaire.

Très peu loquaces en début de journée au moment d'évoquer leurs loisirs, ces élèves d'Armentières révèlent pourtant ensuite une connaissance et une conscience souvent aigües du sujet du genre, jonglant avec les concepts de bisexualité, pansexualité, asexualité... Myriam Chetouane les sonde: "Est-ce qu'on ne qualifie pas trop les gens aujourd'hui ?", alors que "la sexualité, ça s'explore sur toute une vie ?", "Est-ce qu'aujourd'hui, on peut être qui on veut ou il y a encore un problème ?".

"Homoromantique" 

La société n'a pas évolué, "elle a même fait un bond en arrière par rapport à l'Antiquité grecque !", lance Laura, 21 ans, qui se définit comme "bisexuelle, homoromantique (attirée sentimentalement par les femmes, ndlr) et non-binaire". L'élève a subi "beaucoup de jugements" et un harcèlement de groupe au collège. Justine, elle, aimerait s'orienter vers la menuiserie mais se voit refuser des stages, faute de vestiaires pour femmes.

Corentin, à l'allure androgyne, raconte avoir été agressé verbalement la veille. Lui voudrait parler de violences physiques et de viol. Après un débat sur l'importance de l'éducation à ces sujets, d'autres participants choisissent de tourner une fiction où une élève interprète la fille d'un couple d'hommes qui se rebelle parce qu'elle croit qu'on veut lui interdire un "jouet de garçon".

Un autre groupe écrit des scénettes sur les stéréotypes liés aux métiers. Entre fous rires et moments de doute, ils campent un homme qui annonce à sa conseillère Pôle Emploi qu'il veut devenir sage-femme et une femme mal reçue quand elle vient dépanner une voiture.

Le 24 juin, un jury de professionnels du cinéma désignera les films les plus pertinents et les plus créatifs issus de ces ateliers organisés dans toute la France.

Rédaction avec AFP


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