Face au Sénat américain, Twitter, Facebook et Google s'agrippent à leur joker  - Réseaux sociaux

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Face au Sénat américain, Twitter, Facebook et Google s'agrippent à leur joker

Les patrons de Twitter, Facebook et Google s'accordent au moins sur un point: la loi sur l'immunité des réseaux, que nombre d'élus veulent réformer, ne protège pas que les plateformes, mais aussi les utilisateurs, y compris les personnalités politiques et organisations qui s'en servent à loisir.

E-llico.com / Actus

Face au Sénat américain, Twitter, Facebook et Google s'agrippent à leur joker
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Mis en ligne le 28/10/2020

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A la veille de leur audition au Sénat américain mercredi, ils ont défendu la Section 230 du "Communications Decency Act", qui empêche les poursuites judiciaires liées aux contenus publiés par des tiers. Cette loi est considérée comme la pierre angulaire de la liberté d'expression en ligne. Mais pour les sénateurs qui ont convoqué les patrons, c'est surtout un moyen pour les plateformes de ne pas prendre leurs responsabilités. Cette Section 230 "encourage l'expression" et "permet aux plateformes de modérer les contenus", a souligné Mark Zuckerberg, le dirigeant de Facebook, dans le discours qu'il devrait lire devant la commission du Commerce.

Sans cette loi, les plateformes censureraient plus de contenus pour ne pas prendre de risques d'être tenues responsables, et s'exposeraient à des poursuites pour avoir retiré des incitations à la haine ou à la violence, argumente-t-il. "Je ne pense pas que quiconque dans cette pièce ou le peuple américain veuille moins de liberté d'expression ou plus de harcèlement en ligne", note de son côté Jack Dorsey, le fondateur de Twitter, dans son intervention.

Cet argument central s'inscrit dans un contexte de tensions à quelques jours des élections du 3 novembre: les réseaux se voient largement reprocher, notamment à gauche, de ne pas suffisamment modérer les échanges sur leurs services et de laisser passer trop de contenus racistes, violents ou insultants.

"Bébé" Trump 

A droite, de nombreux conservateurs américains les accusent, sans preuve tangible, de favoriser le camp démocrate. En juin, le gouvernement et des élus se sont mobilisés pour traduire la colère de Donald Trump contre la Silicon Valley en une réforme de la Section 230. Le sénateur républicain Roger Wicker, qui préside la commission du Commerce, a ainsi proposé une loi qui rognerait l'immunité des plateformes, les forçant à prouver "le caractère raisonnable et objectif" de leur décision quand elles retirent des contenus.

"Au moindre tweet marqué comme 'faux', Trump pleure comme un bébé", commente Hany Farid, spécialiste des plateformes à l'université de Berkeley. "Alors que les réseaux sont dominés par les voix conservatrices!" "Ils devraient faire attention à ce qu'ils souhaitent, parce que sans la Section 230, tous ces 'enfoirés' racistes, homophobes, xénophobes et islamophobes seraient virés de la plateforme", continue-t-il. Ce chercheur, qui a témoigné au Congrès sur la Section 230, soutient une réforme de la loi, mais pour des raisons très différentes de la droite. Il reproche aux réseaux sociaux leur "négligence", qui a entraîné selon lui des violences dans le monde réel, des massacres en Birmanie aux interférences dans les élections américaines et ailleurs en 2016.

"Sur YouTube (Google), 70% des vidéos regardées sont 'recommandées'. Donc ces plateformes sont des éditeurs, pas seulement des hébergeurs, puisqu'ils décident, avec leurs algorithmes, des contenus que vous voyez", explique-t-il.

Monopoles 

La Section 230 protège, de fait, le statut d'hébergeur des réseaux, par opposition aux éditeurs que sont les médias. Facebook et Twitter assurent être favorables à plus de transparence sur leur processus de modération. Mark Zuckerberg a indiqué à plusieurs reprises qu'il était pour des régulations sur les contenus. Il va jusqu'à soutenir une mise à jour de la Section 230, "pour s'assurer qu'elle fonctionne comme prévu".

Jack Dorsey ne va pas si loin, et s'inquiète à l'idée qu'une réforme ne favorise les monopoles existants. "Dans certaines circonstances, des régulations à l'emporte-pièce peuvent renforcer les entreprises disposant de larges parts de marché et qui ont les ressources pour appliquer les nouvelles règles à grande échelle", met-il en garde, soulignant que Twitter a des moyens plus limités que ses rivaux.

L'argument pourrait faire mouche, au moment où Google, Facebook, Apple et Amazon sont accusés d'abus de position dominante. C'est aussi le raisonnement de nombreux militants, car la Section 230 protège également les forums et blogs des répercussions en cas de comportements répréhensibles des utilisateurs.

Pour Shireen Mitchell, une des membres du "Real Facebook Oversight Board" ("Véritable conseil de surveillance de Facebook"), qui accuse la plateforme de ne pas lutter suffisamment contre les contenus problématiques, avant de changer la Section 230, il faudrait déjà que les réseaux respectent leurs propres règlements. "S'ils appliquaient leurs propres règles, nous n'aurions pas la moitié de ces problèmes", estime-t-elle.

Rédaction avec AFP

 

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