Le gouvernement va durcir les lois contre l'esclavage sexuel de jeunes garçons - Afghanistan

Afghanistan

Le gouvernement va durcir les lois contre l'esclavage sexuel de jeunes garçons

L'Afghanistan, longtemps pointé du doigt pour son laxisme, s'attaque au "bacha Bazi", une pratique très répandue d'esclavage sexuel de jeunes garçons, en s'apprêtant à durcir considérablement sa législation.

E-llico.com / Actus

Le gouvernement va durcir les lois contre l'esclavage sexuel de jeunes garçons
Afghanistan

Mis en ligne le 22/02/2017

Tags

Afghanistan bacha bazi

Cette pratique locale pluriséculaire consistant à prendre pour esclave sexuel un jeune garçon est fréquente chez les chefs de guerre, militaires, policiers, mais aussi chez certains hommes politiques et d'autres personnes riches et influentes.

Les experts estiment qu'elle est favorisée par le contexte de stricte ségrégation des sexes au sein de la très conservatrice société afghane.

Les insurgés talibans, qui combattent les forces gouvernementales, se sont servis du "bacha bazi" en retournant contre les forces de sécurité afghanes de jeunes esclaves sexuels exploités, accentuant l'insécurité dans des provinces déjà instables, comme Uruzgan dans le sud du pays.

Le gouvernement, sous pression des militants des droits de l'Homme qui dénoncent cette pratique, semble désormais prêt à agir et à adopter des lois punissant sévèrement ses auteurs.

Le code pénal afghan sera révisé pour inclure des peines de prison et même la peine capitale pour les cas les plus graves, comme le viol de plusieurs enfants. "Il y a tout un chapitre criminalisant la pratique (du bacha bazi) dans le nouveau code pénal", a indiqué à l'AFP Nader Nadery, un conseiller du président afghan Ashraf Ghani.

"Le code devrait être adopté ce mois-ci. Cela représentera un grand pas vers la fin de cette affreuse pratique", a-t-il ajouté.

Le projet de texte est intitulé "Pousser les enfants vers la corruption morale". Il prévoit que les victimes ne pourront pas être poursuivies, une clause qui n'a rien d'évident pour les victimes de crimes sexuels en Afghanistan.

Jusqu'ici, la loi afghane se limitait à interdire l'homosexualité et les relations extra-conjugales.

Bacha bazi signifie "jouer avec les garçons" en langue darie. Habillés en femme, maquillés, ces garçons âgés de 10 à 18 ans sont parfois kidnappés et vendus pour être utilisés comme danseurs et jouets sexuels lors de soirées entre hommes.

"Ce chapitre définit clairement le bacha bazi comme un crime, sans ambiguïté", se félicite le conseiller juridique du président Ghani, Nasrullah Stanekzai.

Députés réticents

Les défenseurs des droits de l'Homme tentaient depuis des années de convaincre les autorités de légiférer contre le bacha bazi mais se heurtaient à une vive réticence de certains députés.

Le nouveau code pénal devrait être adopté par décret présidentiel au cours de l'actuelle pause parlementaire. Mais Soraya Sobhrang, de la Commission indépendante des droits de l'Homme, redoute que certains élus ne tentent de l'affaiblir lorsqu'il sera examiné par le Parlement.

L'Afghanistan a peiné dans le passé à appliquer des mesures similaires à celle-ci, notamment des lois censées éliminer la violence à l'encontre des femmes et interdire le recrutement d'enfants-soldats. En particulier lorsque les personnes impliquées sont influentes.

"La criminalisation explicite dans la loi de cette pratique détestable est à saluer, mais l'application des lois en Afghanistan est sujette à caution", déclare le projet All Survivors, qui compile mondialement toutes les données sur les violences sexuelles subies par les hommes et les garçons dans les zones de conflit.

"Comment le gouvernement prévoit-il de surveiller, d'enquêter et de faire assumer leurs responsabilités à ceux qui abusent de jeunes garçons sous cette nouvelle législation ?", s'interroge All Survivors.

Alors que le pays reste englué dans un conflit de plus en plus violent, la lutte contre l'esclavage sexuel ne fait pas forcément figure de priorité. Et certains commandants soupçonnés de s'y livrer "sont trop importants stratégiquement pour être remerciés", admettent de hauts responsables occidentaux sous couvert d'anonymat.

Mais l'impunité n'est plus garantie pour autant. Le gouvernement a récemment limogé le chef de la police d'un district de la province de Kunduz (nord) après la publication sur internet d'une vidéo montrant une "fête de bacha bazi" organisée par ses soins.

"Lorsque nous avons su cela, nous l'avons renvoyé immédiatement", a déclaré un porte-parole des autorités locales, soulignant qu'il s'agissait d'une sanction inédite dans cette région.

(Source AFP)

Retrouvez les archives d'Illico / E-llico.com.

Plus 40.000 articles de la rédaction retraçant la vie de la communauté LGBT dans les domaines politique, sociétal, culturel et sanitaire de 2001 à 2022.

Tapez un mot-clé exprimant votre recherche dans le moteur de recherche ci-dessus.