ATTENTION DANGER -  LIEUX DE DRAGUE

LIEUX DE DRAGUE

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ATTENTION DANGER
LIEUX DE DRAGUE

Mis en ligne le 30/11/1999

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Sans en rajouter dans la surenchère sécuritaire pré-électorale, il faut bien constater que les agressions physiques contre des gays sur des lieux de drague tendent à se multiplier. Témoignages à l'appui, nous ouvrons ici un dossier que la police n'évoque qu'avec réticences…

Par Jean-François Laforgerie et Ivan Samour

"C’était la première fois que je draguais à Paris. J’ai découvert les Sablières sur le net. J’avais déjà entendu parler d’agressions. A Angoulême dont je suis, j’avais bien vu parfois quelques courses-poursuites. Mais le 24 juin dernier, il en a été tout autrement. Vers 4 heures du matin, je me suis retrouvé face à un groupe de dix personnes qui m’ont interpellé. Je n’ai pas eu le temps de parler, de tenter de les raisonner, pas eu le temps de faire quoi que ce soit. Ils m’ont jeté à terre et donné des coups de pieds dans les côtes, des coups de pied dans la tête, tapé sur le visage avec des bâtons".
Emu, Fabrice, 27 ans, a du mal à revenir sur cette soirée d’après Gay Pride. Venu à Paris avec son copain d’alors et un ami, il avait décidé d’aller faire un tour sur un lieu de drague. Là, il s’est retrouvé pour la première fois devant une bande de jeunes venue casser du pédé… le jour de la fierté gay.

"Au début, j’ai eu très mal et puis après, c’était comme si je m’étais déconnecté. Je ne sais plus si je sentais quelque chose. J’ai eu alors un sentiment d’extrême solitude. Cela m’a paru une éternité. Je me demandais jusqu’où ils allaient aller. A l’hôpital, l’interne m’a dit que partis comme ils étaient, ils auraient pu me tuer. Ils étaient extrêmement silencieux. Je ne les ai pas entendu arriver. Moi, je me souviens d’avoir hurlé". Très mal en point, Fabrice n’a qu’une idée : avant de se faire soigner, il veut retrouver ses amis. Il craint qu’eux aussi aient été agressés. Ce n’est pas le cas. Pourtant, il a bien entendu la bande crier : "Il faut s’occuper des autres", en l’abandonnant. Les autres, ce seront John et plusieurs gays qui ne se présenteront pas aux policiers ni aux pompiers appelés au secours.
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Comme d’autres lieux de drague extérieurs, les Sablières (les quais de Seine entre la porte d’Ivry et la Bibliothèque François Mitterrand) sont souvent dangereuses. Quoique très fréquenté, le lieu, retiré et très connu (ce qui ne présente pas que des avantages), est régulièrement le théâtre d’agressions. Au commissariat du XIIIe arrondissement dont dépend le lieu, le commissaire divisionnaire Cermaria n’a "pas de souvenir de cette affaire. Il n’y a pas, à ma connaissance, de dépôts de plainte concernant ce lieu. Ce n’est pas une zone particulièrement criminelle". Et le commissaire de répondre à la question : organisez-vous des rondes aux Sablières pour en assurer la sécurité ? : "Tout le XIIIe est couvert par la police". On nous dira aussi que les plaintes pour agressions homophobes en tant que telles n’existent pas dans le Code pénal.

"Pour mon dépôt de plainte fait au commissariat de Sceaux — c’est là qu’habitent les amis qui nous hébergeaient — j’ai été reçu par un policier, genre emploi jeune. Poli, il a enregistré ma plainte et m’a dit qu’elle serait transmise au commissariat du XIIIe. J’ai dit qu’il s’agissait d’une agression homophobe. Cela n’a pas fait tilt. Du reste, cela ne figure nulle part dans ma plainte alors que c’est le motif de mon agression. J’ai voulu porter plainte parce que sinon cela signifiait la victoire totale des agresseurs. De retour chez moi, j’ai eu quelques cauchemars, des réactions de peur très violentes lorsque j’ai voulu retourner sur un lieu de drague. Depuis, cela va mieux. Mes hématomes ont fini par partir, les marques sur mon visage aussi et la cicatrice sur mon front s’estompe. Je sors de nouveau mais ne peut m’empêcher de penser qu’il n’y a pas de solidarité chez les gays sur les lieux de drague. Mon ami a beau me dire : "L’union des faiblesses ne fait pas une force". Moi, je continue pourtant de penser le contraire."

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