<I>La Parade</I>, dénonciation de l'homophobie en Serbie - Cinéma

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La Parade, dénonciation de l'homophobie en Serbie

En racontant l'histoire sanglante d'une gay pride à Belgrade dans son film "La parade", sur les écrans mercredi, Srdjan Dragojevic espère faire coup double: dénoncer l'intolérance qui règne en Serbie envers les homosexuels et prouver que l'entente entre ex-Yougoslaves est possible, malgré les préjugés qui persistent vingt ans après la guerre.

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La Parade, dénonciation de l'homophobie en Serbie
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Mis en ligne le 15/01/2013

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Il ne fait pas bon être homosexuel en Serbie: lors de la première gay-pride du pays, en 2001, plusieurs dizaines d'homosexuels avaient été blessés par des "hooligans" et "néo-nazis", sous les yeux de policiers impassibles.

Une décennie plus tard, "rien n'a changé dans ce domaine", écrit Dragojevic dans le livret de présentation de son film.

En 2010, un millier d'homosexuels serbes avaient courageusement décidé de retenter l'expérience, défilant calmement dans le centre de Belgrade. Malgré 5.600 policiers pour les protéger, des dizaines d'entre eux avaient de nouveau été passés à tabac.

Ces événements constituent la toile de fond du film, où l'humour, antidote à la bêtise, est omniprésent.

Lemon (Nikola Kojo), parrain des gangsters de Belgrade, à la mine patibulaire, est profondément homophobe (ce qui ne l'empêche pas de pleurer devant sa télé en regardant pour la nième fois Ben Hur retrouvant son ami d'enfance, dans des scènes d'amitié aussi viriles qu'ambiguës).

Il est aussi profondément amoureux de Pearl (formidable Hristina Popovic en femme capricieuse et championne de combat rapproché) qui a chargé, sans le dire à Lemon, une agence tenue par un homosexuel d'organiser leur prochain mariage.

Afin de complaire à Pearl, qui menace de le quitter, et pour sauver son pitbull chéri - soigné par un vétérinaire homosexuel, compagnon du précédent - Lemon n'a pas le choix: il doit assurer la sécurité de la gay-pride de Belgrade.

Pour l'aider dans cette mission impossible, il part à la recherche d'anciens mercenaires. Serbes, Croates, Bosniaques, Kosovars qui se sont connus - surtout combattus - pendant la guerre de l'ex-Yougoslavie se retrouvent aux côtés des militants homosexuels.

Gay-pride "en salle"

Les retrouvailles entre les ennemis d'hier donnent lieu à des scènes cocasses. Lemon se fait traiter par les autres de "tchetnik" (terme péjoratif pour désigner un Serbe), le Croate d'"oustachi", le Kosovar de "Shqiptar". Mais quand il s'agit de désigner les homos, tout le monde est d'accord: ce sont des "pédés".

Dans "La Parade", le réalisateur ne se contente pas de dénoncer l'intolérance envers les homosexuels. Il tourne aussi en dérision les préjugés entre anciens Yougoslaves. "Elle est mignonne", s'exclame le Serbe devant une vieille femme de Bosnie-Herzégovine, qui leur lance un grand sourire, avant de mimer avec la main qu'elle aimerait leur trancher la gorge.

Difficile pour les ex-Yougoslaves de renoncer à leurs vieux démons. Mais si, bon gré, mal gré, tous ont fini par ranger leurs armes, pour les homosexuels, qu'ils soient d'ailleurs serbes, croates (45 crimes contre les homosexuels en Croatie en 2011) ou bosniaques, la situation ne s'est pas améliorée.

En octobre dernier, menacés par des groupes extrémistes, les homosexuels serbes ont préféré organiser leur gay-pride "en salle" à Belgrade.

Même Srdjan Dragojevic a dû se cacher. "Face aux menaces d'une organisation nationaliste et néonazie, nous avons dû tourner presque secrètement, avec un manque constant d'argent", affirme le réalisateur.

Mais "réaliser La Parade était mon devoir de citoyen", ajoute Dragojevic, déjà réalisateur de "Joli village, joli flamme" (1996) et Rane" (1998), deux films qui furent les premiers à susciter le débat sur la guerre.

"Je crois fermement que La Parade aura un effet similaire sur la nation serbe", affirme-t-il.

(Source AFP)

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