Portrait
Jean-Paul Montanari, la danse pour mission
En Europe, en Afrique, en Asie... depuis trente ans, Jean-Paul Montanari parcourt les continents avec dans son viseur des créations inédites, des chorégraphes innovants qui font de la "danse une manière de penser le monde", pour les présenter au Festival international de Montpellier.
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Jean-Paul Montanari, la danse pour mission
Portrait
Mis en ligne le 27/09/2013
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A 66 ans, directeur de "Montpellier danse" et de "l'Agora, la cité de la danse", Jean-Paul Montanari est le "maître de ballet" de la danse contemporaine en France et prosélyte de l'art du mouvement déstructuré.
"La danse contemporaine s'adresse à une part inconsciente de notre sensibilité. Il faut faire un effort pour aller vers elle", dit-il. Et de souligner que "contrairement à la littérature, à la peinture ou la musique, elle ne se conserve pas. Elle n'a d'existence que dans l'esprit de ceux qui sont là (...). Chaque chorégraphe, créateur invente son vocabulaire et raconte l'instant présent. Ensuite, ça disparaît."
Ses choix font référence pour les producteurs qui viennent nourrir leur programmation à Montpellier. Même si régulièrement Montanari les surprend. Comme en 1991, où il a ouvert la danse au conte, à la chanson, au reggae. Le thème, c'était la danse mène la danse. Suprême NTM y était apparu. C'étaient les débuts d'un certain Joey Starr. Très vite le hip hop et les autres expressions issues des quartiers avaient suivi.
Nouvelle idée iconoclaste et en corollaire flopée de critiques, en 1992: il fête 1492 sous l'angle de...l'expulsion des juifs et des arabes d'Espagne. Une folie dont il reconnaît qu'il n'aurait "peut-être plus le courage". Toujours est-il qu'après cette édition, cet enfant d'Alger, né d'une mère juive mais baptisé, arrivé avec ses parents à Lyon en 1962, a continué dans la danse à raconter "l'histoire de (s)on coeur et de (s)on âme".
"Trio infernal"
En dépit des années, les goûts de Montanari n'ont pourtant que peu évolué depuis son coup de foudre pour la danse. C'était en 1967 devant un ballet de Béjart à Avignon. Une passion renforcée plus tard par les spectacles des américains Merce Cunningham et Trisha Brown. "J'avais compris que la danse américaine répondait à toutes les questions que je me posais. Que c'était une manière de penser le monde sous l'angle de l'énergie, de l'espace, du rapport entre les gens", souligne-il.
Jean-Paul Montanari refuse de s'attribuer le succès du festival ou de l'Agora, le centre chorégraphique devenu national en 1984. Il est installé aujourd'hui dans un magnifique ancien couvent rénové. A ses yeux, les lauriers reviennent à l'initiateur, son compagnon, le chorégraphe et danseur Dominique Bagouet, mort du sida en 1992, et à Georges Frêche, figure tutélaire du Languedoc Roussillon et défunt président de région. "Nous formions un trio infernal", dit-il.
C'est en 1979 qu'il rencontre les deux hommes. Dominique Bagouet, c'est le fruit du hasard d'une programmation. A ce moment, le chorégraphe, prometteur, débute. Montanari, lui, est depuis 1975 responsable de la communication du théâtre du 8e à Lyon, et il a convaincu son directeur, Roger Girones, d'ouvrir l'établissement à la danse.
La rencontre avec Frêche, "mon grand frère", dit Montanari, a lieu dans la foulée. Et cette fois c'est grâce à Bagouet que l'élu héraultais est allé le chercher, pour "concevoir un rendez-vous culturel qui aurait une renommée sans coûter trop cher", selon Montanari.
A l'époque, Bagouet n'affiche pas sa sexualité. Au contraire de Montanari, connu pour être une figure de la lutte pour les droits des homosexuels et pour son esprit gauchiste. "On s'était battu en 1968 pour un monde meilleur", rappelle l'ex-étudiant en lettres, qui avait suivi trois ans de cours de chinois par pure conviction politique.
Aujourd'hui, il se veut plus consensuel. Il est fini le temps où il ouvrait le festival de danse avec un tee-shirt d'Act-up (1989) ou paradait en tête de la gay pride (1995) alors qu'il travaillait au cabinet de Frêche. "Je laisse ces combats aux autres", avoue Montanari, qui n'a même pas pris part au débat sur le mariage des homosexuels: "Ça ne m'intéresse plus", dit-il.
(Source AFP)