Expo
Le Centre Pompidou-Metz explore l'art inclassable des années 1990
Où sont passées les années 1990 ? Marquée par un monde où les grandes utopies et contre-cultures ont été réduites à néant, cette décennie artistique échappant aux définitions ressuscite dans une exposition du Centre Pompidou-Metz.
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Le Centre Pompidou-Metz explore l'art inclassable des années 1990
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Mis en ligne le 27/05/2014
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Si l'on croise un Gameboy jauni et des baskets Reebok Pump, que l'on entend des guitares plaintives de Sonic Youth et que l'on aperçoit l'inquiétante forêt de la série télé Twin Peaks de David Lynch, l'exposition, ouverte samedi, ne cherche pas pour autant à reconstituer une époque ou à tomber dans la nostalgie d'un temps idéal.
"1984-1999. La Décennie" explore plutôt les formes et le contexte qui ont grandement influencé l'art contemporain actuel, dans un espace scénographique entre chien et loup, métaphore du caractère intermédiaire, presque adolescent de cette époque. Les années 1990 marquent "la fin des récits héroïques" et des utopies des décennies précédentes, rappelle Stéphanie Moisdon, commissaire de l'exposition.
"La transgression s'est banalisée" et au risque de perdre son âme, "l'art fait désormais partie des industries culturelles de masse que sont la publicité, la télévision, le cinéma et la musique", rappelle-t-elle. "Je perçois dans notre génération le sentiment universel que tout a déjà dit et fait", avait déclaré un jour le chanteur Kurt Cobain du groupe Nirvana, icône triste de l'époque dont la chanson "Smells Like Teen Spirit" est à la fois l'âme et la hantise.
"Hantés par le présent", les artistes de cette génération se saisissent d'objets immédiatement disponibles pour leurs travaux, qu'ils ne considèrent plus comme des "créations", ont massivement recours à la vidéo et à la photo, des formats plus légers, reflets aussi d'une certaine précarité, selon Stéphanie Moisdon. C'est une époque de "micro-révolutions", de groupes artistiques éphémères et à géométrie variable, sans hiérarchisation ou proclamations péremptoires.
"C'est une époque fondamentalement 'queer', transgenre", poursuit-elle. C'est aussi une période où le sida, encore mal connu voire ignoré, fait des ravages. Plusieurs artistes présents dans l'exposition sont d'ailleurs morts de la maladie. Mais leurs travaux présentés ne sombrent pas dans la mélancolie: l'humour décalé, la dérision et les couleurs folles ne sont jamais loin. Alors qu'aujourd'hui "on est en plein dans la société du risque et du principe de précaution, les artistes de l'époque n'ont jamais accepté d'être dominés par la peur", estime Stéphanie Moisdon.
"1984-1999. La Décennie" dure jusqu'au 2 mars 2015.