Cinéma
Saint Laurent ou la douleur de la création par Bertrand Bonello
Dans "Saint Laurent", en salles mercredi, avec Gaspard Ulliel dans le rôle titre, le réalisateur Bertrand Bonello a voulu montrer ce que "cela coûtait au couturier d'être Yves Saint Laurent tous les jours", entre création et dépression.
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Saint Laurent ou la douleur de la création par Bertrand Bonello
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Mis en ligne le 19/09/2014
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C'est le deuxième film sorti en quelques mois sur la vie d'Yves Saint Laurent, réalisé sans aucune aide du compagnon et partenaire historique de Yves Saint Laurent, Pierre Bergé, hostile au projet.
"Chez Saint Laurent, la création a toujours été une douleur, même s'il y est toujours arrivé. Et cette douleur il l'a vécue par des très, très grands hauts créatifs et des très, très grands bas dépressifs", expliquait à l'AFP Bertrand Bonello au dernier Festival de Cannes où le film était présenté en compétition officielle.
"C'est cette espèce de contraste, de côtoiement qui m'intéressait. Tout le film est bâti sur des contrastes - le jour/la nuit, le haut/le bas, la créativité/la morbidité", ajoutait Bonello selon lequel Saint Laurent était pris aussi d'une "folie esthétique sur les objets, sur les maisons".
"Tout homme est multiple, et celui-ci est encore plus multiple", disait-il.
Le réalisateur a concentré son scénario sur une dizaine d'années (1967-1976) la "décennie la plus riche, la plus intéressante en terme de mode, de vie". "Saint Laurent est presque un jeune homme au début, alors qu'après, la fin est déjà dite", relevait encore Bertrand Bonello.
Yves Saint Laurent (incarné plus âgé par Helmut Berger) écrira avoir mené "un combat de l'élégance et de la beauté qui passe par bien des angoisses et des enfers".
Entre temps, la drogue, l'alcool, les nuits à chasser dans les lieux de drague homo souvent glauques sont devenus les compagnons de tourment du couturier qui se détournera de Pierre Bergé (Jérémie Rénier) pour Jacques de Bascher (Louis Garrel, troublant), à l'époque amant de Karl Lagerfeld.
Bonello construit son film sur deux palettes: celle de la lumière, de la couleur, côté création, défilé et fêtes délirantes, et puis celle de l'obscurité, de la noirceur pour l'enfoncement dans la dépression et la dépendance.
Dans la tête d'un créateur
Gaspard Ulliel, qui restitue toute la complexité de Saint Laurent, expliquait avoir été séduit par cette "odyssée dans la tête d'un créateur, un vrai film sur le processus créatif" plutôt qu'un biopic.
Le premier film consacré à la vie du couturier, né en 1936 à Oran et mort à Paris en 2008, est sorti en janvier dernier et a réuni plus de 1,6 million de spectateurs en France.
"Yves Saint Laurent", de Jalil Lespert avec Pierre Niney, était soutenu par le compagnon et partenaire historique de Yves Saint Laurent, Pierre Bergé qui lui avait ouvert les archives de l'ancienne maison de couture.
"Nous n'avons eu accès à rien du tout même pas une chemise!", s'exclamait à Cannes Eric Altmayer, un des producteurs du film en rappelant l'opposition de Pierre Bergé au deuxième projet.
"Donc tout ce que vous avez vu dans le film a été recréé", a-t-il dit ou "loué à un collectionneur comme les robes de la collection Libération". De même le long métrage reconstitue l'appartement de la rue de Babylone, où vivait le couturier, avec une précision étonnante.
"C'est vrai qu'on a tout refait comme un créateur de mode", poursuivait Bonello.
"On a monté un atelier de couture pour refaire les deux défilés du film! La difficulté a été de trouver les croquis et surtout les tissus notamment pour la collection russe qu'on est allés rechercher en Italie et dans le sud de la France, afin d'avoir cette texture tellement reconnaissable et unique", selon lui.
"Saint Laurent" réunit encore à l'affiche dans le rôle des muses et amies du couturier Léa Seydoux (qui campe Loulou de la Falaise), Aymeline Valade (Betty Catroux) et Amira Casar (Anne-Marie Munoz). Dominique Sanda incarne la mère de Saint Laurent.
(Source AFP)