Edouard Louis revient avec <I>Histoire de la violence</I> - Littérature

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Edouard Louis revient avec Histoire de la violence

Depuis le succès spectaculaire de son premier roman, "En finir avec Eddy Bellegueule", Edouard Louis était attendu au tournant. Il revient avec "Histoire de la violence", récit tendu et puissant, confirmant sa voix singulière dans le paysage littéraire français.

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Edouard Louis revient avec Histoire de la violence
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Mis en ligne le 25/01/2016

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"Il faut se mettre en danger, sinon à quoi bon écrire", affirme Edouard Louis, jeune homme de 23 ans, rencontré par l'AFP près de chez lui à Paris.

Récit d'un viol suivi d'une tentative de meurtre une nuit de Noël, "Histoire de la violence" (Seuil) ne saurait se résumer à cet événement terrifiant.

"La mise en danger, insiste Edouard Louis, c'est d'assumer comme des choses publiques des choses que le monde social veut faire taire en les cantonnant à l'ordre du privé".

Pourtant, reconnaît-il, "c'est difficile d'écrire sur la violence qu'on a subi".

"Un des grands drames de l'existence, c'est qu'on n'arrive pas à dire +je suis dominé+, on n'arrive pas à dire 'je suis violent'. On préfère se mentir à soi-même".

En choisissant de faire raconter son agression par sa soeur qui, dans le roman, rapporte à son mari ce que son frère lui a confié, Edouard Louis nous parle de notre identité. Comment est-on défini avec les mots des autres?

"Après ce qui m'est arrivé, quand j'ai raconté cette histoire à la police, à mon médecin, ce qui m'a tout de suite frappé, c'était que mon histoire était prise dans les mots des autres, les narrations des autres", se souvient le jeune écrivain.

"J'avais l'impression que tout le monde racontait autour de moi mon histoire, encore plus que moi".

D'où l'idée de ce roman polyphonique, admirablement construit avec une succession de flash-back, où ce que lecteur lit ne correspond pas à ce qu'Edouard a vraiment vécu durant cette terrible nuit de Noël 2012.

Ce que j'aurais pu être

"On ne se reconnaît pas dans ce que les autres disent de nous et souvent, nous souffrons de cet écart entre la façon dont nous, on se pense et la façon dont les mots des autres nous pensent", explique Edouard Louis qui, parallèlement à son travail d'écrivain, prépare un doctorat d'Etat en sciences sociales à l'Université de Picardie d'Amiens (UPJV) après être passé par l'Ecole normale supérieure (ENS).

Le livre est "une sorte de vengeance" contre le discours des autres qui essayaient "de me voler mon histoire", poursuit le jeune auteur qui, en 2014, a dû subir des critiques parfois violentes et a été accusé de trahir la vérité, après la publication de "Pour en finir avec Eddy Bellegueule" (300.000 exemplaires vendus), récit sur son enfance et adolescence brutalisées dans un village de Picardie, en raison de son homosexualité.

"Dans 'Histoire de la violence' il y a une forme de rupture par rapport à 'Eddy Bellegueule'", explique Edouard Louis. "Dans 'Eddy Bellegueule', un des thèmes du livre était que les mots des autres constituait notre identité (pédé, femme...). Dans 'Histoire de la violence', c'est un peu le contraire. Les mots prononcés par ma soeur ne sont jamais en phase avec ce que je suis. Ses mots ne correspondent jamais à mon identité, à mon vécu, à mon expérience", dit-il.

Sans jamais basculer dans un pseudo cours de sociologie, le livre nous éclaire sur les causes de la violence. Edouard Louis raconte ainsi la vie du père de Reda, son agresseur, un émigré algérien qui échoue dans un misérable foyer pour immigrés.

Lui-même, selon les mots de sa soeur, aurait pu devenir un délinquant. Il raconte sans fard sa peur après son agression, ses pulsions racistes qui lui font horreur. Edouard Louis nous interpelle. Quel hasard nous fait choisir, ou pas, un autre chemin?

"Il y a une sorte de miroir entre Reda et moi. On est radicalement différents mais Reda représente la possibilité de ce que j'aurais pu être à un moment donné", souligne-t-il, sa propre histoire prouvant qu'"à l'intérieur d'une vie, il y a toujours plusieurs possibilités".

(Source AFP)

 

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